Bon,
ça fait déjà quelques jours de passés, de la relation de ce
voyage, et je m'aperçois que je vous ponds de la merde. Oui oui, le
mot est trivial, mais c'est quand même bien le cas. Je vous raconte,
quoi, un dépliant touristique, une lettre à mes copines ? Je passe
à côté de l'essentiel, je ne fais que de l'anecdotique. Parce que,
je le crains fort, l'essentiel n'est pas dans ce que nous avons fait,
mais dans ce que nous avons été, et ça, voilà,
c'est le territoire de l'indicible, et je me sens impuissante et
conne, absolument conne, devant ça. L'indicible. Et tu fais quoi,
pauvre cloche, devant ce que tu ne sais pas dire, hein ? Tu fais
quoi, devant tout ce vécu tellement intense et éblouissant, qu'on
ne peut qu'espérer le voir surgir en filigrane, irradier depuis le
territoire du non-dit, vers ce qui est exprimé là, d'anecdote en
anecdote.
Vraiment,
tiens, j'en chialerais. Je me sens grondante de colère, là, devant
ce que je raconte. Comme si quelque chose m'échappait, ne voulait
pas se laisser dire, ne voulait pas se laisser capturer, galvauder de
page en page.....
Ce qui
s'est vécu.
Ce que nous avons été.
Ce que
nous n'arrivons, jamais, au grand jamais, à sortir de nous-même,
car c'est notre âme, notre propre substance, et que, quelle que soit
notre bonne volonté, nous ne savons jamais l'extraire de nous dans
nos écrits.
Vigny, en fait, avait raison : « seul le
silence est grand. »
Aussi,
me tairais-je ? Vais-je vous laisser en vrac, là, comme ça, sur un
coup de colère, par rage de l'impuissance, sur le quai d'un voyage à
peine effleuré ?
Ah, je
ne sais plus où j'en suis, vous savez.
Mais
je sais, que, comme Bernard Dimay, « je ne dirais pas tout. »
Il y a, de ce voyage, des images que vous ne verrez pas, du vécu
que je ne sais pas dire, des choses que je garderai, jalousement et
égoïstement, pour moi.
Mon viatique : ce qui sera celé.
Mais,
alors, que donne-t-on jamais de soi ?
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Alors,
continuer le « petit-tour-et-puis-s'en-va » ? Dans le
banal de quelques jours de vie, qui n'ont justement rien eu de banal
– dichotomie.
Donc,
munis de nos vêtements de bain, nous avons pris la route, Marsi,
Venise et moi, en direction d'Eastman. Parce que, et c'était pour
cela, le maillot de bain, nous allons d'abord prendre un bon repas
gastronomique au restaurant du Spa, avant de profiter des
installations du lieu.
Eastman,
c'est à environ une cinquantaine de km au nord-ouest de Cowansville,
et le paysage se vallonne de plus en plus en s'y dirigeant, jusqu'à
ressembler, vaguement, à un Morvan qui aurait eu toute la place
qu'il lui faut, au lieu de se resserrer dans un espace étriqué
comme chez nous. Tout s'y loge entre les arbres, c'est vraiment très
beau. Nous ferons un bon repas dans une vaste et lumineuse salle de
restaurant, très agréable. Je découvre que sucrer son yaourt au
sirop d'érable est un plaisir divin, qui me laissera quelques
frustrations de retour en France....
Puis
nous voilà au pied du mur, si j'ose dire : l'idée, c'est d'aller
DEHORS en maillot de bain, jusqu'au jacuzzi extérieur ( on flirte
avec des températures plus basses que -10°C), et de barboter
gentiment dans une eau à plus de 40°C, avant d'aller, suivant les
options retenues, soit se rouler dans la neige, soit se plonger dans
un trou dans la glace dans le petit lac extérieur ( gasp !), soit
passer dans les bassins d'eau froide à l'intérieur, soit se
rafraîchir sous une douche-aérosol qui pulvérise délicatement une
gentille brumisation froide additionnée d'huiles essentielles
tonifiantes. Pour ma part, c'est cette dernière option que je
retiendrais. Et on y va ! D'abord, passer à la douche, et bien se
nettoyer. Et hop, tout le monde dehors pour 20 minutes.....!
Eh,
mais c'est que c'est pas mal du tout, ce truc....!!!!!
Barboter
dehors dans l'eau chaude, c'est franchement le pied total. Quoi, le
froid ? Mais, on ne s'en rend même pas compte, du froid !!!! Je vous
dis qu'on est bien, absolument bien.....
Donc,
suivons la procédure : 20 minutes de jacuzzi, 5 de douche, un petit
quart d'heure de repos, allongé paisiblement dans le
solarium....puis un petit sauna (je tiendrais 10 minutes), puis de
nouveau la douche, puis repos....etc.
Nous
alternons les plaisirs dispensés par l'endroit, et je commence à me
sentir bien, mais bieeeeen......je glisse doucement vers le
marshmallow, je me « dévertébrise », je redeviens
l'être sans défenses ni épines qui naquit naguère, je reflotte
dans les eaux-mères, sans stress, sans appréhension, je me refonds
dans l'originel aqueux, je me ressource, au sens propre du terme.
C'est à-peu près ramollis que nous sortons du Spa, la nuit
tombe déjà, nous ne ferons qu'un très bref tour dans Eastman, pas
le temps....il faudra que je revienne ! Au temps des jours plus longs
?
La
soirée se passera bien paisible, et quelle nuit réparatrice et
détendue suivra !
Demain arrive bien vite, demain qui me
verra sur la route de Québec, où Venise et Marsi passeront le
relais à Elizabeth, qui va m'amener à Rimouski, où je vais passer
un peu de temps chez elle.
De
Cowansville à Québec, 215 km environ. De Québec à Rimouski, 315.
Quelle traversée !!!
Ça
me fait bizarre de partir de chez Venise et Marsi....j'y ai passé de
si bons moments. Et puis, nous avons vécu, parlé de choses et
d'autres, et tant encore restait à dire, à lire, à voir, à
partager !!! Ses amis, on aimerait les voir « mieux »...Venise
me prête un de ses livres auxquels elle tient : c'est un gage de se
revoir : ce livre-ci, ils viendront tous deux le rechercher, ici, aux
Ocreries, un jour ou l'autre !
Chez moi, c'est loin d'être
aussi confortable et agréable que chez eux, et j'espère que d'ici
leur venue, les lieux se seront améliorés un peu....
Encore
une fois, l'asphalte m'avale, toujours plus loin....
Encore
une fois, je vais piquer mon roupillon une bonne partie de la route.
Bien la peine de voyager, tiens....
A
Québec, où nous arrivons pour le repas du midi, nous retrouvons
Elizabeth au Cochon Dingue – et je me régale. C'est une vraie joie
de la revoir ( et dans ma mémoire, j'ai à jamais son grand beau
sourire éclatant, quand nous sommes rentrés au Cochon Dingue et
qu'elle nous a aperçus....), nous nous étions tellement bien
amusées, aux Ocreries, en avril dernier ! La grosse valise rouge
coincée dans la malle arrière de la Mini, nous filons vers de
nouvelles aventures – même si je me crispe un peu à la voir
utiliser son régulateur de vitesse. Faut dire qu'en France, ces
machins-là, ça marche pas toujours bien, et qu'on voit parfois des
bolides fous semer la panique sur les autoroutes....avec les
conséquences qu'on imagine.
Mais la Mini tiendra bon jusqu'à
Rimouski, ouf – et avant, revenons à Québec, où nous nous
offrons un petit tour de ville, glacial, après avoir pris congé de
Venise et Marsi – avec un petit pincement au cœur....c'est ça, ce
genre de voyage : on est à la fois tout à la joie des rencontres,
et tout à la tristesse des départs....c'est une fatigue, tant
physique qu'émotionnelle, surtout pour moi qui vois peu de monde, en
général, et qui sors peu, par goût.
Evidemment, nous sommes tombées devant un magasin de bonbons....où je n'ai pas pu m'empêcher de lâcher encore quelques dollars. Ah, je l'aurais bien dévalisé, ce magasin...!!!
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Vers Eastman |
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Au Spa |
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Le Pont de Québec ; cette fois, il ne s'est pas effondré. |
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Une bonne cantine ! je vous le recommande.... |
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En route pour de nouvelles aventures ! |
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A Québec.... |
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Une caisse-enregistreuse des années 20, Québec, Magasin Général. |
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Château-Frontenac, incontournable. |
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Tout un monde : le traversier sur le Fleuve gelé...et cette lumière incomparable qui à elle seule fait aimer l'hiver.
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